CHAPITRE 1
« Qu'il est plaisant de tromper le trompeur. »
Griffin McAlister
▬ Manchester - 1688
Aimer fut pour Aslander la plus grosse erreur de sa vie. Après avoir tout tenté pour devenir un héros de son temps il en oublia jusqu'à la plus belle des vertus en tombant sous le regard d'une jeune femme. Il avait le monde à ses pieds, ascension fulgurante d'un jeune prodige. Il avait le talent en héritage, le soutien de tout un peuple et les convictions d'un géant. Il était homme, mais l'amour l'avait dévoré jusqu'à la moelle. Il avait cédé sous le poids des armes, cédé à son charme. Et elle était belle, oh oui, qu'est-ce qu'elle était belle avec ses longs cheveux bruns tombant en cascade sur de frêles épaules pâles. Elle avait le regard d'une enfant et le sourire d'une déesse et sur ces joues, délicatement déposées, deux fleurs rosées. La pâleur de sa peau brillait sous les faibles éclats solaires du nord de l'Angleterre. Aslander n'avait pas résisté. Il voulut l'épouser mais elle refusa. Cependant, ils vécurent nombres de nuits passionnées, il était sous son emprise, lié à des chaînes qu'il ne repoussait pas.
Bien des décennies plus tard, les derniers battements de son cœur lui revenaient en mémoire avec un goût amer, les derniers battements de son cœur avaient été pour celle qui les lui a ôtés. La nuit étendait un lourd drap de soie noir sur le Lancaster ce soir-là et il se souvenait qu'il allait la retrouver, sa bien-aimée. Comme chaque soir depuis de nombreuses mois. Il avait attelé son cheval à la lisière d'un jardin et s'était, avec discrétion, approché de la maison. Il en avait ouvert la porte et trouver sa belle en grande discussion. Elle parlait de morts, de sang et d'animaux étranges qu'elle nommait vampire ou strige. Terrifié à ses propos il entreprit de revenir le lendemain mais elle l'entendit et se rua sur lui avec la force et la vitesse d'un félin. Dans un murmure elle lui demanda de lui pardonner puis avait déchiré la peau de sa nuque. Accompagnée de l'inconnu avec qui elle entretenait la discussion qui coûta sa vie à Aslander, elle l'abandonna au beau milieu des bois, le laissa pour mort. Le surlendemain, il s'était éveillé après nombres de cauchemars douloureux, comme un nouveau né il n'avait pas compris le monde qui l'entourait et souffrait d'une faim qu'il ne pouvait étancher. Il s'était rabattu sur un habitant de la forêt, un ermite dont la disparition ne ferait réagir personne. Après avoir vidé le pauvre homme de son sang en cédant à une pulsion qu'il ne pouvait contrôler, il comprit avec terreur ce qu'il était devenu. On lui avait parlé de ces créatures immortelles qui se déplaçaient à la lueur de la lune, créatures dont les légendes faisaient des monstres sanguinaires. Influencé par la rage, il partit retrouver la jeune femme, cette strige, qui l'avait infligé de l'immortalité. Se jouant d'abord d'elle avec mépris il la tua dans un excès de colère. À l'aube qui suivit, il s'en alla et ne revint sur ses terres natales que des années plus tard.
CHAPITRE 2
« Le sang attire le sang »
Aslander O'Bannon
▬ Londres - 1941
La ville était décimée par l'attaque de l'Allemagne, Churchill appelait au combat et criait : " Agissez comme s'il était impossible d'échouer." Séduit par les discours de cet homme, Aslander s'engagea dans l'armée et partit défendre les lignes alliées en France. Néanmoins, après que son régiment fut anéanti il ne rentra pas en Angleterre mais reste aux côtés des Français qui se battait dans le "maquis", pour la France et pour son peuple, pour la liberté et leurs droits. Aslander retrouva en ces hommes les valeurs qui lui tenait tant à cœur d'incarner lorsqu'il était humain. De plus, les champs de batailles se révélaient être de véritables buffets à volonté. Cependant, il fut vite rattraper par la monstruosité du genre humain.
- ♣ Journal d'Aslander O'Bannon
Depuis plus de trois cent ans, je n'ai plus porté la race humaine dans mon cœur, si tant est qu'il m'en reste un, et des journées comme celle que je viens de vivre n'aide en rien à faire remonter ces animaux dans mon estime. Je n'ai plus aucun intérêt pour leurs vies, ils ne sont pour moi qu'un immense choix, un buffet à disposition, des jouets, des être faibles. Certes l'humain assimile le vampire à un monstre, ce que je ne contredis pas, mais il ne s'est encore jamais regardé dans le miroir. Sans doute en a-t-il peur ? Je ne suis en rien touché par la mort de ces gens, j'identifie plutôt cela à du gâchis. Devant moi s'est, ce matin, déroulé une scène que jamais je n'aurai pu imaginer. Des hommes enfermant d'autres hommes, des femmes et des enfants dans un train, séparant mères et fils pour les envoyer au trépas. L'espèce humaine, insignifiante porteuse de sang, se croyant au sommet de la chaîne alimentaire n'est rien dans l'histoire du monde qu'un virus.
• Deux mois plus tard ; après réintégration dans un bataillon anglais.
- ▬ Je n'ai rien fait pour que ça change, les choses n'auraient pas été si amusantes.
▬ Nous nous sommes pris pour des dieux, et ce sont les hommes qui en payent les consequences !
▬ Je t'en pris Tristàn, ils ne sont que notre nourriture, l'ordre et la façon dont ils meurent je n'en ai rien a foutre tant qu'il me reste de quoi déjeuner.
▬ Tu n'es qu'un animal enragé.
▬ Je te remercie du compliment ! Lança Aslander en se levant.
Aslander riait, jaune, les humains n'avait en rien besoin de lui pour se détruire, ils couraient seuls à leur perte. Et même si beaucoup d'hommes avaient payés du trépas un acte guidé par l'orgueil du vampire, ce dernier n'en éprouvait aucune tristesse, ni même un infime regret. Que c'était-il passé ? Trois fois rien pour l'immortel qui avait tenté une mutinerie - énervé de recevoir des ordres - et suivit par d'autres soldats et un autre vampire, avait fini face aux fusils de ceux pour qui il se battait.
CHAPITRE 3
« Colosse aux pieds d'argile. »
Aslander O'Bannon
▬ Poudlard - 2009
Visage d'ange pour un être démoniaque, illusion du désir, attirance du risque et de la mort, Aslander se tenait debout face à l'un des nouveaux directeurs de Poudlard, un homme, grand, charismatique, et le même regard sang que notre protagoniste. Les mains dans les poches en signe de désinvolture, l'anglais regardait ledit Adonis Waels avec lequel il venait de signer son entrée à l'école des sorciers. Oh Aslander ne s'était pas résigné à ne plus se délecter du nectar rougeâtre qui l'avait maintenu en vie ces presque trois cent cinquante dernières années, disons qu'il avait appris à mentir à la perfection durant sa longue existence et monter pareille arnaque n'avait pas été chose facile pour faire sa rentrée dans cette école. Pourquoi le vampire s'était-il inscrit à Poudlard me direz-vous ? Et bien ce cher O'Bannon s'était attiré des déboires vis à vis d'un groupe de son espèce on ne peut plus hostile. Son seul moyen d'échapper à ses poursuivants était l'école alors pourquoi ne pas passer quelques années - poussière lorsque l'on est éternel - dans cet établissement où il avait appris ses premiers tours, il y a déjà plus de trois siècles.
Un matin, l'air frais de l'atrium et une jeune femme particulièrement intrigante. Comme une gifle, un coup de poing, Aslander resta stupéfait. Et cela ne lui était pas arrivé depuis longtemps. Sublime, les cheveux bruns tombant sur son corps mince et des fossettes marquées lors d'un sourire. Il la connaissait, le contraire aurait été impossible mais elle ne pouvait pas... il l'avait tuée. Et pourtant, elle n'était pas la strige qui avait fait de lui cet être surnaturel, non elle était humaine mais portait ce parfum si léger pareil à celle qui devait être son ancêtre, il n'y avait pas d'autres explications. Caitlin Austen était descendante des enfants de la nuit. Le visage de celle qu'il avait aimé aveugla Aslander, il avait l'impression que c'était il y a mille ans, il avait l'impression que c'était hier, un souvenir, un songe qui avait laissé place à la réalité. [/list]